PME _ Un exemple pour la France, La renaissance de Timisoara

Débats et Opinions | LE FIGARO
31 décembre 2002

Par Sabine Renault-Sablonière

« Timisoara revit. Cet automne, à Trieste, dans le cadre  d’un programme d’études et d’innovations sur le développement local et la création d’entreprise que dirige Sergio Arzeni, on a pu le vérifier. Il a beaucoup été question des « districts industriels » des pays d’Europe centrale que des PME italiennes ont su constituer en délocalisant leurs activités.

Parmi les deux cents Européens présents, le secrétaire d’État roumain Christian Colteanu a cité l’exemple du district de Timisoara où 1200 PME du nord-est de l’Italie se sont implantées dans des secteurs variés : textile, céramique, meuble, papier, etc. Timisoara, on s’en souvient, est cette ville de Roumanie où eut lieu l’un des montages les plus sordides de la révolte contre le pouvoir totalitaire de Ceauscscu. Quinze ans après, elle renaît…

En Roumanie, 12000 entreprises italiennes au total se sont installées. Elles ont créé plus de 100000 emplois. La réunion Internationale de Trieste a montré que les PME jouaient bel et bien un rôle majeur dans élargissement économique et commercial de I’UE.

Des chiffres rappelés par le secrétaire d’État aux PME Renaud Dutreil soulignent l’importance, au niveau mondial, de l’essaimage des petites et moyennes entreprises. En France, comme dans tous les pays développés, le réseau des PME et TPE (Très Petites Entreprises) couvre l’essentiel de l’activité économique et de l’emploi.

Cependant avec un total de 2,4 millions de PME. notre pays ne se situe pas dans le peloton de tête. L’Espagne crée annuellement le double d’entreprises et les Anglais 50 % de plus. La densité entrepreneuriale française, c’est-à-dire le nombre d’entreprises rapporté au nombre d’habitants, paraît faible comparée à celle de nos partenaires concurrents : comparée au Royaume-Uni, la France devrait avoir 3,4 millions de petites entreprises. Et 4,4 millions si nous étions au niveau des Américains.

L’Amérique est à la fois l’univers du gigantisme économique et le royaume de la PME et de la TPE. C’est dans le monde de l’entreprise moyenne que percent les tendances innovatrices. Ainsi la recherche appliquée conçue en milieu universitaire donne-t-elle des constellations de petites entreprises édifiées en bordure des campus d’université.

Un rapport du MIT sur « l’impact de l’innovation » a montré que dans la région de Cambridge, aux portes de Boston, 15000 emplois avaient été créés au sein de PME fondées par les propres diplômés du prestigieux lnstitut de technologie du Massachusetts. Sur le campus de l’université de San Diego en Californie, 80 entreprises de biotechnologie et de biologie médicale dues à l’initiative d’étudiants ont permis la création de 7000 emplois. Près de l’université du Texas, plusieurs centaines de petites unités orientées vers la haute technologie ont généré 40000 emplois. Pour désigner ce phénomène, les Américains parlent des « parcs de recherche » qui fonctionnent comme autant de pôles économiques. On en dénombre aujourd’hui près de 200.

Joseph Schumpeter, l’un de nos économistes majeurs du XXe siècle, disait que le chef d’entreprise est un acteur social qui a les yeux de l’avenir. Les patrons de PME possèdent cette qualité : pour s’en convaincre, il suffit de comparer la persévérance ingénieuse des entreprises italo-roumaines du district de Timisoara ou des « parcs de recherche » américains avec la chute fulgurante, désastreuse, de Vivendi Universal ou de AOL Time Warner.

La France va-t-elle un jour accorder toutes ses chances à la PME et à la TPE ? Nous avons eu droit à des dizaines de rapports de gauche et de droite vantant leurs mérites. Des discours sans retombée concrète. Voici enfin qu’à la demande de Jean-Pierre Raffarin un projet de loi sur « l’initiative économique » a été déposé. On peut espérer qu’il posera les conditions d’un vrai choix individuel entre salariat et entreprenariat. Car si les sondages révèlent que 14 millions de Français souhaiteraient devenir entrepreneurs, le nombre de créations d’entreprises, lui, diminue… »